Textes descriptifs de

Damien Tremblay

La Justice et Uriel

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Justice, les yeux bandés , trône impassible, assistée d' Uriel , l'archange tutélaire chargé d'assurer le bon droit d'ici bas et armé d'un sceptre à tête de juste. La balance , symbole même de l'impartialité, aide l'officiant à peser sa décision.

Sur le plateau de droite, le chêne évoque la communication entre le ciel et la terre; sur celui de gauche, la pomme de pin réfère au sceptre de Bacchus , celui de la vérité manifestée.

Au niveau des symboles animaux, le serpent représente, dans nos Palais de justice, la prudence, et partant, la sagesse.

La peintresse sculpte

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Dans ce monde imprévisible de la création, la peintresse ressent parfois le besoin de sculpter ses états d'âme et renouer ainsi avec ses ancêtres pluridisciplinaires. Dans cet autoportrait , l'artiste a exagéré l'importance de ses mains, médiatrices essentielles de ses arts.

Pour la jupe de la peintresse au chevalet et aux sculptures, l'artiste s'inspire fortement d'une illustration Des clères et nobles femmes de l'écrivain italien Boccace, né à Paris en 1313.

Tout au bas de l'oeuvre, le personnage de la maçonne provient d'une enluminure du roman Les maçonnes , de Girart von Roussillon, auteur ayant vécu dans les Flandres, au XV e siècle.

La faiseuse d'anges

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Digne devant la vie, comme devant la mort, et coiffée du chérubin qu'elle engendre, la faiseuse d'anges (l'avorteuse) subit à travers les âges l'opprobre des pouvoirs temporels et spirituels; son histoire est jonchée d'ostracisme, de proscription, de tortures, de bûchers et de guillotines.

Tout récemment, en France, le 5 avril 1971, une bombe éclate sous forme d'un manifeste pour l'avortement libre et gratuit, signé par 343 femmes qualifiées de « salopes » par leurs détracteurs. Quelques semaines plus tard, des Allemandes et des Américaines publieront un manifeste semblable.

L'artiste Nicole Tremblay a choisi ici de peindre sur la jupe de son personnage, une illustration du XIX e siècle, où l'avorteuse était représentée en terrifiante ogresse , par de mauvais bergers de la race.

L'orpailleuse

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Cette oeuvre ne verse dans aucune symbolique rigoureuse. L'orpailleuse témoigne d'une grande fierté avec un profil de grande noblesse. La tenue vestimentaire ne laisse aucun doute.

Une vie couronnée de succès, dans la manipulation aérienne de délicates feuilles d'or soumises à ses desseins artistiques.

Les encadrés, qui se succèdent de haut en bas, témoignent d'un labeur accompli sous le signe de la patience.

Saint-Nicolas, dispensateur de généreuses balles en or, pourrait être le saint patron de cette orpailleuse.

L'oiseleuse

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

L'oiseleuse affiche une indéniable parenté avec l'orpailleuse. Autant pour le type de femme que pour la facture esthétique.

Alors que l'orpailleuse négocie avec la légèreté aérienne de la feuille d'or, l'oiseleuse s'est éprise d'amour pour la gent volatile.

Elles forment toutes les deux, un diptyque incontournable qui va de soi : l'orpailleuse à gauche et l'oiseleuse à droite. Elles se tournent le dos; mais il n'y a aucun risque d'affrontement dans leur aura de sérénité.

L'alchimiste et l'escarpolette

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Juché sur la couronne de l'alchimiste, un volatile rappelle que l'art de la transmutation des métaux transitait par le langage des oiseaux.

Sur les franges vertes gauche et droite, on retrouve les symboles des sept métaux planétaires  : l'or, l'argent, le cuivre, le fer, le mercure, le plomb et l'étain. Dans sa main droite, l'alchimiste tient le vase philosophal et, dans sa gauche, niche une lune en croissant .

En arrière-plan, dans la partie centrale de l'oeuvre, des gravures du XVIII e siècle confirment que femmes et hommes poursuivaient ensemble la quête philosophale, armés d'alambics, de pilons, de vases et autres instruments d'alchimistes qui constituent les tenants de l'escarpolette.

Le personnage pose enfin délicatement ses pieds nus sur ce qui pourrait être une première distillation offerte à la Luna .

L'enlumineuse

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

L'oeuvre s'amorce dans sa partie supérieure gauche par une enluminure représentant Saint-Nicolas , patron de l'artiste. La robe elle-même a trouvé son inspiration dans une Danse paysanne , enluminure tirée du livre des Heures de Charles d'Angoulème .

En arrière-plan, dans la partie inférieure de l'oeuvre, de part et d'autre de l'artiste, l'érudit aura reconnu des campagnards en pleine fenaison empruntés à une enluminure sur parchemin, du recueil des Très Riches Heures du duc de Berry , réalisé par les frères de Limbourg au début du XV e siècle.

L'enlumineuse elle-même dégage une fraîcheur juvénile, sans âge et sans contraintes, toute gorgée de créativité; comme il y a des patriarches sans âge, au summum de leur énergie créatrice et aux antipodes de certains jeunes, vieillards rassis et rancis en fin d'adolescence.

La prima donna

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Cette cantatrice à la facture typique des représentations contemporaines de l'artiste, réalise la confluence de plusieurs prédécesseures oubliées dans les méandres de l'histoire.

La chanteuse campée sur sa jupe provient d'une Allégorie du chant (1755) du peintre espagnol Nicolas Valeta . Nous y voyons la grâce incarnée du caractère unique de la voix féminine avec lequel aucun instrument ne peut rivaliser. Son visage exprime la joie de chanter; mais tout son être dégage une impression de naturel qui occulte une technique fort exigeante.

Pour le bas de la jupe, l'artiste nous offre un brelan fort prestigieux. À gauche, Maria-Felicia Malibran (1808-1836), dont la voix allait de l'alto au soprano, mourut à 28 ans d'un accident équestre; avec à droite, sa soeur, la mezzosoprano Pauline Viardot (1821-1910) qui avaient pour père et professeur de chant réputé, l'espagnol Manuel Garcia (1775-1832). Le centre de ce salon historique est occupé par Louise de Savoie , une célèbre musicienne française de la fin du XV e siècle.

La dentellière

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Chez l'artiste Nicole Tremblay, le sujet rappelle des souvenirs d'enfance et de multiples dentelles provenant de ses garde-robes. Toute jeune, elle avait appris avec sa mère la frivolité, sorte de dentelle exécutée à la navette.

À gauche de notre Dame, on reconnaît la célèbre dentellière de Vermeer de Delft, peintre néerlandais du XVII e siècle. Un peu plus bas, à droite, l'artiste a peint un coussin saxe pour la dentelle aux fuseaux, à partir d'une gravure de l' Encyclopédie des ouvrages de dames par Thérèse de Dillmont, parue au début du XX e siècle.

L'artiste a évidemment pris un plaisir particulier à enrichir le somptueux vêtement de sa belle dame.

Les doigts de fée

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Nous voilà en présence d'une dessinatrice de mode aux doigts de fée, voyageuse à travers le temps et l'espace! Sa chevelure rutilante n'arrive pas à faire ombrage à l'amazone Maud Betelson habillée avec une robe et coiffe métal signées Paco Rabane ; un rappel de la cotte de maille antique.

Le haut de la robe est inspiré d'un travail du newyorkais Richard Lindner (1969) et remis en scène par le couturier Jean-Paul Gaultier , en 1990.

À gauche du buste, la reine Sémiramis , une figure légendaire de l'Antiquité assyrienne, vêtue en guerrière médiévale; détail d'une miniature du début XV e siècle. En-dessous, belle dame portant un corset à la fine pointe de la mode 1831. Tout en bas, deux robes Pop Art se marient en 1966 sous la griffe de Yves Saint-Laurent .

À droite, la reine Elisabeth 1 re , à Londres, vers 1592, d'après Marcus Gheeraerts le Jeune (Bruges, 1561-Londres, 1636). Elle est juchée sur un piédestal signé Piet Mondrian , d'après un tableau de 1921.

La doctoresse d 'Asclépios

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

La doctoresse d ' Asclépios (dieu de la médecine chez les Grecs) est une protagoniste majestueuse, haute en couleur et remplie de symboles. Sa tête de Gorgone abrite des serpents aux venins parfois mortels, parfois salutaires.

Sur sa robe, le système sanguin apparaît en transparence. Du côté gauche de la Gorgone, le sang est sinistre, mortel; les veines du côté droit, elles, fournissent un sang bénéfique. L' estomac en transparence est celui de Shennong, un ancien empereur chinois, qui pouvait ainsi observer les effets sur son organisme de tout ce qu'il mangeait et buvait.

En bas, à gauche, Asclépios dans sa tenue reptilienne, accompagné du caducée , emblème universel de la science médicale. Ce dernier représente la dualité du serpent, bénéfique et maléfique à la fois, et l'antagonisme chez les êtres vivants : Yin et Yang, Sympathique et Parasympathique, etc. Il est aussi le symbole privilégié de l'équilibre psychosomatique.

En bas, à droite, l'ange Raphaël , dont le nom signifie guérison, soulage le monde et les créatures des nombreuses épreuves infligées par notre ignorance.

La sage-femme

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

En haut, à gauche du tableau, une Enseigne de sage-femme du château Gue-Pean, en Allemagne.

L'accoucheuse de Nicole Tremblay porte le chapeau noir de sage-femme des reines de France (vers 1563-1636). Le haut de sa robe met en transparence notre statut de mammifères, au sein de la création.

À partir du ventre, vers le bas, l'artiste a choisi comme motif, l'utérus avec les différentes positions de l'enfant, selon une page enluminée du Traité de médecine des femmes de Soranos d'Éphèse, paru en Asie Mineure au II e siècle; le premier traité de gynécologie connu dans l'histoire.

Le bas de la robe, savamment travaillé en dentelle, illustre à sa gauche la sage-femme Louise Bourgeois montrant au roi Henri IV et sa cour le dauphin Louis XIII. À droite, une Scène d'accouchement où la parturiente, entourée de la matrone et d'assistants, est installée sur le siège de délivrance peu avant l'expulsion. L'artiste a décalqué cette réalité à partir d'une tablette votive de Dropo, au Musée national d'Athène.

La chapelière

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique, sable et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

Encore une fois, l'artiste Nicole Tremblay se fait plaisir en témoignant des extravagances qui ont su secouer la torpeur de toutes les époques.

Comme souvent elle l'a fait, l'artiste n'hésite pas a affubler son modèle d'un chapeau oiseau digne d'une impératrice des pâturages célestes.

Elle étale ensuite sous nos yeux   une série de couvre-chefs rivalisant d'excentricité pour la plupart. En haut, à gauche, la reine Marianne d'Autriche , par Velázquez; suivie de la Marie-Antoinette à la rose (1783) de Louise-Élisabeth Vigier-Le Brun; Anne de Hongrie , par Hans Maler (1470-1530); couvre-chef pour une fille-femme (fin du XIX e siècle); le marchand Giovanni Arnolfini (1434) peint par Jan Van Eyck; sans oublier Gala couronnée d'un chapeau soulier réalisé par Elsa Schiaparelli , à partir des croquis de Salvador Dali, l'époux de Gala; et, en toute fin, une femme à casquette.

À droite du sujet principal, de haut en bas : un officier de hussards haut de forme; George Sand en costume d'homme, d'après une lithographie de Gavarni; suivie de près par une belle des années vingt , au temps du Charleston; pour terminer avec un modèle Kenzo de sa collection 1988, dont la gamme de couleurs était, au départ, en filiation avec Matisse; mais le port de tête et la légèreté procèdent du couturier.

L'écrivaine

De la série Chacune son métier

Tableau acrylique et feuille d'or sur toile

De l'artiste Nicole Tremblay

Hauteur 121cm    Largeur 40,5 cm

L'écrivaine utilise la plume, cet outil affiné par quelques millénaires d'hégémonie masculine, mais dopé par des poches de résistance féminine. En haut, à gauche, l'oiseau de l'inspiration, assimilé à une arme de combat redoutable, au service des oppresseurs et des opprimés. Cet art se dédie donc à un très large spectre de l'activité humaine : de l'estafilade à la convivialité, du lyrisme à l'hyperréalisme, du machiavélisme à la magnanimité, de l'altruisme au mondialisme, de la misanthropie à la philanthropie, etc. Le personnage central s'inspire d'une enluminure du Moyen Âge.

À sa gauche , de haut en bas : Sapho de Lesbos , poétesse grecque du VI e siècle avant Jésus-Christ, qui, d'après les fragments parvenus jusqu'à nous, savait assumer ses pulsions et affirmer ses convictions avec un charme étrange et nouveau, brisant les tabous; détail d'une enluminure du XIII e siècle rappelant Dhuoda , une aristocrate carolingienne rédigeant en 841 le Manuel pour mon fils , le seul ouvrage du genre écrit par une femme et reflétant les valeurs aristocratiques de l'époque; suivie d'une lectrice rencontrée dans une enluminure anonyme.

Du côté droit, toujours de haut en bas : une écrivaine au travail (Musée impérial de Tokyo), en hommage à Murasaki Shikibu , un monument de la littérature japonaise remontant à l'aube du 2 e millénaire; une féministe, Christine de Pisan , au tout début du XV e siècle, avec son livre Cité des Dames , répond aux aboiements d'une meute de misogynes; Mary Shelley (1797-1851), l'auteure de Frankenstein , fille du poète Shelley et de l'écrivaine Mary Wollstonecraft (la première féministe anglaise ?); Isabel Allende , dont la couverture de son fascinant roman La Cité des dieux sauvages (paru chez Grasset) a servi à enjoliver la robe du personnage central; enfin, pour couronner cet aréopage littéraire du deuxième sexe, Simone de Beauvoir (1908-1986) surprise à naviguer avec un certain optimisme dans les eaux troubles de l'existentialisme, afin d'aider Sartre à faire ses rots dialectiques et exorciser ses névroses toxiques et contagieuses.